Villette Maximilien


Chef de bataillon Rocolle



Carte de la Bataille de la "Trouée de Charmes"
Carte Bataille de la "Trouée de Charmes"
(23-18 Août 1914)
























Ensemble du Vieux-Canton

Fort du Vieux-Canton

Ouvrage du Mordant

Ensemble de Bouvron

Ouvrage de Bouvron

Ouvrage de Francheville

Ouvrage de la Cloche

Ouvrage du Ropage

Fort de Manonviller

Août 1914

La Guerre est déclarée !

Le 3 Août, l'Allemagne déclare la guerre à la France.
Le Parlement convoqué en session extraordinaire se réunit le 4. Au Sénat, le Garde des Sceaux, ministre de la justice, Jean-Baptiste Bienvenu-Martin lit un message du Président de la République, puis Réné Viviani, président du Conseil, donne lecture d'une commnunication du Gouvernement :

"la France, injustement provoquée, n'a pas voulu la guerre. Elle a tout fait pour la conjurer. Puisqu'on la lui impose, elle se défendra contre l'Allemagne et contre toute puissance qui, n'ayant pas encore fait connaître son sentiment, prendrait part au côté de cette dernière au conflit entre les deux".


Les deux chambres votent ensuite à l'unanimité une série de textes de défense nationale, puis l'ordre du jour de cette session extraordinaire étant épuisé, le Parlement s'ajourne sine die.

168e d'Infanterie - Caserne Marceau - Juillet 1914
"168e d'Infanterie à la Caserne Marceau de Toul, en Juillet 1914"

Le plan du Maréchal-Comte Alfred von Schlieffen, (1833-1913), préconisait une attaque brutale destinée à mettre à terre la France en quelques semaines ; laissant ainsi toute latitude à l’Allemagne pour se retourner efficacement contre la Russie dont la mobilisation effective ne semblait pas envisageable avant de longues semaines. L’objectif ? Fondre sur Paris en contournant les Ardennes, les Vosges et les forteresses de Verdun, Toul, et celles d’Epinal et Belfort en s’infiltrant entre cette dernière et Nancy par la trouée des Charmes.
Le plan XVII adopté par les Français, misait l’essentiel sur l’invasion de l’Alsace et la Lorraine annexées. Ni l’un ni l’autre de ces plans n’abouti. Si l’Allemagne, violant la neutralité luxembourgeoise et belge, progresse rapidement vers Paris, elle doit prélever du front de précieuses divisions pour faire face à la surprenante rapidité de la mobilisation russe, (15 jours), et se voit infliger un cuisant revers dans la Marne. Quant aux français, l’offensive en Lorraine se solde par un échec. Après quelques succès (libération de Thann, Mulhouse, faubourgs de Colmar), l’armée française ne peut concrétiser les objectifs du plan XVII. La 2e armée de Castelnau se replie sur le Grand Couronné de Nancy. Le front se stabilise alors sur une ligne allant de Gerbeviller à Mont sur Meurthe, suivant la Mortagne, traversant la forêt de Vitrimont, passant par le Léomont, la tuilerie de Réméreville, Erbéviller, Champenoux et longeant les pentes du Grand Couronné jusqu’à Pont à Mousson, dans les environs de laquelle nous retrouverons notre 167e RI au mois de Septembre 1914.


"Etat-major du 167e Régiment d'Infanterie"

Pour l'heure, le 167e, Régiment de Forteresse de Toul, commandé par le Lieutenant-Colonel NITARD, reçoit l'ordre de mobilisation le 1er Août 1914. A la réception de cet ordre, la composition du Régiment est la suivante :
1er Btn, 2e Btn, ½ 3e Btn (11e et 12e Cies) et C.H.R. à Toul et dans les ouvrages du secteur Nord-Est. ½ 3e Btn (9e et 10e Cie) au fort de Manonviller (mobilisation spéciale ; fort d’arrêt).  

Le 167e occupe donc tous les ouvrages défensifs au Nord-Est de la place de Toul, couvrant un arc de cercle de Sanzey à Villey-St-Etienne, interdisant les accès possibles sur le Terrouin et la Moselle.

1er Août :

  • Etat-major et C.H.R.A. à la caserne Gengoult.
  • 1ere Cie : 1 peloton à la Caserne Gengoult et 1 peloton à l’Ouvrage du Mordant.
  • 2e Cie : au Fort du Vieux Canton.
  • 3e et 4e Cie : au village de Villey-St-Etienne.
  • 5e Cie : aux positions avancées de Bouvron.
  • 6e Cie : 1 peloton au Centre de Résistance de Bouvron-la Cloche, et 1 peloton à Francheville dans un premier temps, ensuite à la Cloche.
  • 7e Cie : 1 peloton au fort de Bouvron et 1 peloton aux positions avancées de Bouvron.
  • 8e Cie : 1 peloton à l’ouvrage de la Cloche et 1 peloton au centre de résistance de Bouvron – la Cloche.
  • 11e Cie : Positions avancées de Francheville.
  • 12e Cie : 1 peloton à l’ouvrage de Francheville et 1 peloton rejoignant l’ouvrage de Francheville pour remplacer la ½ 6e Cie.
La ligne de couverture du Terrouin est tenue par :
  • ½ section du 1er Bataillon au pont canal sur le Terrouin.
  • 1 poste de 4 hommes du 1er Bataillon au pont sur la Moselle du chemin de Villey St Etienne à Fontenoy.
  • 1 sentinelle (1er Bataillon) au pont de Villey St Etienne sur le canal.
  • 1 section du 3e Btn au pont de Jaillon, avec un poste de 4 hommes au vieux-Pont, à 600 m en aval.
  • 1 poste d’une ½ section du 3e Btn au pont d’Avrainville.
  • 1 poste d’une ½ section du 3e Btn au pont du moulin de Manoncourt avec poste de 4 hommes au Vieux-Pont, au nord de la ferme Boyer.
  • 4 postes de ½ section du 3e Btn (11e Cie) aux pont d’Andilly, Ménil la Tour (deux), Sanzey.
Tout le mois d'Août sera consacré principalement à l'organisation défensive de la zone confiée au 167e ; acceuil des réservistes, réquisition de nombreux civils afin d'entreprendre les travaux nécessaires, déboisement, aménagement des champs de tir, creusement des tranchées, établissement de réseaux de fil de fer etc...

5 Août :

Etat d’avancement des travaux :

  • 1ere Cie : le parapet à l’Ouest de Villey St Etienne a été redressé. Le déboisement à la lisière Est du bois de Villey, près de la voie ferrée, est commencé.
  • 2e Cie : aménagement de l’Ouest du Vieux-Canton.
  • 3e Cie : Tranchées du groupe d’ouvrages n°2 terminées. Dégagement du champ de tir. Epaulement pour mitrailleuses.
  • 4e Cie : Tranchées terminées. Commencé un ouvrage semi-permanent. 1 abri de combat. Epaulement pour mitrailleuses. Un réseau de fil de fer. Dégagement du champ de tir.
  • 7e Cie : Deux tranchées terminées complètement.
  • 5e, 6e, et 8e Cie : Continuation de l’organisation du C.R. de Bouvron-la Cloche.
  • 11e et 12e Cies : Francheville. Tranchées. Blanc d’eau. Pont de Jaillon.

10 Août :

Répartition du Régiment.

  • Centre de Résistance du Vieux-Canton : 2e Cie du 167e. Cdt du fort du Vieux-Canton, le Capitaine Jeanpierre, cdt la 2e Cie du 167e.
  • Ouvrage du Mordant : 1 peloton de la 1ere Cie. Cdt du Mordant, le Capitaine cdt la 1e Cie du 167e.
  • Ouvrage de Mauvais Lieu : 1 peloton de la 1e Cie. Réserve du C.R.
  • C.R. de Villey St Etienne : 3e et 4e Cies du 167 sous le commandement du Chef de Btn Duchaussoy, cdt le 1er Btn du 167e.
  • C.R. de Francheville : 11e Cie du 167e. 1 peloton de la 12e Cie du 167e, sous les ordres du Cdt du 2e Btn du 42e T.
  • C.R. de Francheville-Ropage : 1 peloton de la 12e Cie à l’Ouest de Francheville, sous les ordres du Capitaine Pierrard, Cdt la 12e Cie du 167e.
  • C.R. de Bouvron : 5e Cie. 1 peloton du la 7e Cie. Cdt du C.R. le Capitaine Sestre, Cdt la 5e Cie.
  • C.R. de Brouvron-la Cloche : 6e, 8e Cies. 1 peloton de la 7e Cie. Les troupes du C.R. autres que les garnisons de la Cloche et de Bouvron sont sous le commandement du Capitaine de la 6e Cie.
  • Ouvrage de Bouvron : 1 peloton de la 7e Cie, sous le Cdt du Capitaine Goût.
  • Ouvrage de la Cloche : 1 peloton de la 8e Cie, sous le cdt du Capitaine Girard.

Le 167e Régiment d'Infanterie n'a pas encore été engagé dans les durs combats qui font rage sur le Front. Cependant, il pleure déjà ces trois premiers morts et la défaite française de Morhange.
Compte tenu de la proximité de la frontière, le commandement allemand a truffé la région de positions fortifiées fort bien préparées. Malgré ces caractéristiques , Joffre a prévu dans son plan opérationnel de lancer la IIe armée du général de Castelnau à l’assaut de ce bastion, (Située dans la zonne des étangs au Nord-Ouest de Sarrebourg, Morhange fait partie, en 1914, de la Lorraine annexée à l'Empire allemand). Les 15e et 20e corps s’emparent, dès le 18e Août, des villages frontaliers, mais viennent buter les 19 et 20 contre ces lignes farouchement gardées par les détachements du prince Ruprecht de Bavière. Le 15e corps reflue après avoir éprouvé des pertes sensibles, découvrant le 20e corps qui repousse tous les assauts allemands avant de décrocher à son tour.

Groupe du 167e d'Infanterie
"Groupe du 167e d'Infanterie" coll. Lefloch Yann

Le 22 Août, les Allemands occupent Lunéville. Le Fort de Manonviller s'en trouve complètement isolé et soumis au bombardement ennemi. On se rappelle que les 9e et 10e Cie du 167e Régiment, sous le commandement du Chef de Bataillon Rocolle, sont stationnées au Fort. Le 24 Août 1914 tombe le Soldat Henri Bétaille de la 10e Cie, premier tué du 167e RI, à ma connaissance, au cours d'un échange de feu entre patrouilles française et allemande. Deux autres soldats , Eugène Feltz (9e Cie) et Maximilien Villette (10e Cie), sont tués les 26 et 27 Août (jour de la reddition de la place). Tous trois sont inhumés dans la même fosse, au carrefour des routes de Manonville à Laneuville-aux-bois, à la sortie du Fort.

La bataille de Morhange est donc un échec, les Allemands ne l’ayant livrée que pour fixer d’importantes forces françaises dans cette partie du front, alors que l’effort principal de l’envahisseur est porté en Belgique.
Cependant, Moltke entrevoit la possibilité de donner une toute autre envergure à sa manœuvre, certains désormais de pouvoir effectuer un débordement par l’Est afin d’encercler l’ensemble des forces françaises. En s’engouffrant dans la « Trouée de Charmes », puis contournant les places de Toul et Verdun, la VIe Armée allemande prendra à revers les IIIe et IVe Armées françaises de Sarrail et Langle de Carry, déjà aux prises avec deux autres armées allemandes sur la Marne.
Cette manœuvre se heurte du 23 au 27 Août 1914 à la résistance victorieuse de l’armée de Dubail, entre Meurthe et Mortagne, puis entre Mortagne et Moselle. Une contre-attaque rejette les Allemands depuis Rozelieures jusqu’à la rive droite de la Mortagne (27 au 29 Août).


Après la défaite de Morhange, il s'agit d'une victoire hautement psychologique pour nos troupes. Celle-ci ont fait preuve d'un courage et d'une opiniâtreté que les Allemands ne soupçonnaient pas.